Un certain nombre de déclarations et d’actions récentes des autorités saoudiennes sont à relever en ce sens qu’elles reflètent les ambitions économiques du royaume au moment où la sortie de crise sanitaire, la reprise de la croissance dans le monde et la remontée en conséquence des cours du brut ( dépassant désormais les 70 $ le baril ) amènent Riyad à préciser sa stratégie de développement.
L’objectif est naturellement d’inciter les investisseurs internationaux à s’intéresser aux grands projets engagés dans le cadre de la « Vision 2030 ». Concrètement, le gouvernement saoudien ne dissimule pas qu’il vise à faire du royaume le hub commercial, culturel et géostratégique du Golfe, en concurrençant de facto à la fois les Emirats Arabes Unis et le Qatar. Au-delà de la décision annoncée en février dernier que le gouvernement cessera en 2024 de négocier des contrats avec les compagnies internationales qui n’ont pas leur siège régional en Arabie, il est clair que le royaume a désormais une stratégie offensive dans les domaines du sport, du tourisme, de la culture et des transports.
Dans le domaine portuaire, il s’agit de développer les capacités saoudiennes en Mer rouge : Le « Red Sea Gateway Terminal » ( RSGT ), soutenu par le fonds souverain ( PIF ), cherche notamment à améliorer la sécurité alimentaire du pays en renforçant les ports important la nourriture. Le PIF et la société chinoise « Cosco Shipping Ports » ont ainsi acquis chacun 20 % des actions du RSGT en Janvier. L’objectif est d’investir au cours des 5 prochaines années dans 3 ports internationaux, notamment au Soudan et en Egypte. Dans le domaine sportif, l’Arabie envisage de se porter candidate pour héberger la Coupe du Monde en 2030, ce qui comblerait sa jeunesse et couronnerait le terme de la “Vision 2030”. Déjà, le royaume a investi 1,5 Md $ dans l’accueil d’évènements sportifs : football, Formule 1, boxe, catch, billard, Golf, Paris-Dakar etc …
Il n’a en revanche pas réussi à remplacer la chaîne qatarie beIN dans la retransmission des matchs de football de l’UEFA. Dans le domaine de l’énergie, l’Arabie continue à investir dans ses capacités en hydrocarbures : il est ainsi prévu d’accroître le potentiel de production pétrolière de 12 à 13 millions de barils / jour en misant sur le fait que si la demande occidentale baisse, celle de l’Asie continuera à augmenter. Le royaume ambitionne d’être non seulement le pays produisant au meilleur coût le pétrole, mais aussi le gaz, l’hydrogène et certaines énergies renouvelables ( notamment le solaire ). Les autorités de Riyad sont en effet conscientes que leur avantage comparatif est dans le domaine énergétique et qu’il le restera. Cela n’empêche pas les efforts de diversification dans de nouveaux secteurs comme l’industrie minière, mais aussi les sports, les loisirs et le tourisme qui sont pourvoyeurs d’emplois dans les services, au profit des jeunes saoudiens.
L’ “Arabie nouvelle” de Mohamed ben Salman vise donc bien à exploiter toutes ses ressources, même si il est clair que cette stratégie empiètera sur les plate-bandes des Emirats Arabes Unis et du Qatar, qui ont été jusqu’ici les pionniers dans le Golfe du sport, du tourisme, de la culture, du commerce et des transports. La réconciliation en cours au sein du CCEAG n’implique donc pas une renonciation à la compétition économique !