Bien qu’une partie de la gauche, en réalité du centre-gauche, espère encore une épidémie du « syndrome française » – les électeurs de gauche qui votent au centre pour barrer la route à la droite – la victoire de la coalition Berlusconi – Salvini – Meloni aux élections du 25 septembre semble acquise.
Elle semble acquise au moins selon les sondages, qui montrent une alliance de droite stable, un Parti Démocratique (PD) en perte de vitesse et une remontée de ce qui reste des Cinq Étoiles de l’ancien Premier Ministre Conte.
C’est une drôle de campagne électorale qui est en cours, très courte – pratiquement un mois – affectée par les vacances d’été (plusieurs candidats ont dû faire des miracles pour trouver une imprimerie ouverte où faire imprimer le matériel électoral) et avec un Parlement qui a perdu un tiers de ses membres suite à la réforme voulue par le Mouvement Cinq Étoiles et votée par la droite et la gauche en quête de populisme à deux balles.
La droite montre un front uni, même si en réalité ils sont divisés pratiquement sur tout. Le centre gauche quant à lui est fragmenté, même si les différentes solutions proposées ne sont, en réalité, pas si différentes. Il s’agit d’un exemple parmi d’autres : le présidentialisme pour la droite et les soins de santé pour le centre gauche et la gauche. Pourquoi Giorgia Meloni, leader de Fratelli d’Italia – le parti qui descend directement du mouvement fasciste et qui garde encore dans son symbole la flamme qui brûle sur le tombeau de Mussolini – et Premier Ministre « in pectore », devrait être favorable à une réforme constitutionnelle qui transférerait les pouvoirs du Premier Ministre au Président de la République ? Et pourquoi choisir parmi une des trois (voire quatre, si l’on écoute le professeur Conte qui qualifie maintenant les Cinq Étoiles de parti de gauche) composantes d’un centre gauche/gauche désunis, si tous proposent la même chose : « moins privé, plus public ! » et plus d’argent au budget santé ?
Entre les deux, une petite patrouille hétéroclite de centristes, d’un côté l’alliance entre deux egos de taille, Matteo Renzi et Carlo Calenda, de l’autre côté l’inoxydable Emma Bonino, qui a définitivement quitté l’expérience radicale pour ré-embrasser le libérisme (et certainement pas le libéralisme) qui fut à l’origine du Parti Radical de Marco Pannella. Cette patrouille n’a qu’un but : ramasser les votes suffisants pour être indispensables, à droite comme à gauche.
38 symboles sont admis par le Comité électoral national, pour élire 600 membres du Parlement (ils étaient 930 avant la réforme). La droite voit l’union de Fratelli d’Italia, Forza Italia et la Ligue, le centre gauche celle du PD et des deux partis fondés par les transfuges du même partis, Articolo Uno et Sinistra Italiana. Et puis une myriade de seconds rôles, avec une demi-douzaine de partis communistes ou semblables, les Animalistes, les fascistes de Forza Nuova, les « Gilets Oranges » d’un ancien général des Carabinieri (grade révoqué par le ministre de la défense pour avoir déshonoré l’armée), les anti-ivg, les anti-vax/anti-covidpass et quelques listes ducentre avec peu d’espoir de dépasser le « zéro virgule » en pourcentage.
Les protagonistes de ces élections restent les mêmes que ceux de la Première République.
Un ex-Chevalier de la République, de 85 ans, déchu pour indignité, avec deux divorces et une compagne de 32 ans. Une journaliste de 39 ans, diplômée en langues étrangères à l’école hôtelière, un enfant mais pas de mariage. Un repris de justice de 49 ans, divorcé, deux enfants hors du mariage, en couple avec une ancienne Miss Vallée d’Aoste. Ce sont les trois leaders de la coalition de droite, également appelée « Le peuple de la famille », pour la défense de la famille traditionnelle…
Un prof de Sciences-Po, 56 ans, neveu du journaliste Gianni Letta (bras droit de Silvio Berlusconi), entré en politique dans le giron de la gauche démocrate chrétienne, le plus jeune ministre de l’histoire italienne. Un homme politique de profession, 43 ans, un PHD et un diplôme de la London School of Economics, une seule fois ministre, mais de la Santé en pleine pandémie de Covid. La faculté de Philosophie, député à la Chambre depuis 2003, toujours à gauche, plus à gauche que les autres ; le seul à être dans l’opposition au gouvernement Draghi (avec Giorgia Meloni de l’autre côté !) mais candidat dans les listes du PD, à cause du système électoral italien qui est un chef-d’œuvre des byzantinismes…
Voici, en bref, les protagonistes des élections politiques du 25 septembre prochain (Berlusconi, Meloni et Salvini d’un côté, Letta, Speranza et Fratoianni de l’autre).
Une drôle de campagne électorale et un drôle de gouvernement qui s’annonce, dans un pays qui semble glisser de plus en plus vers la droite…