Le premier mardi de novembre, cette année le 5, se tiendront les élections américaines. Ce jour-là, les Américains éliront, dans leur bourg, ville, comté, Etat, leurs shérifs, leurs juges, leurs maires et les autres élus locaux jusqu’aux gouverneurs et aux membres des deux chambres de leur État. Ils éliront aussi, au niveau national, les 435 membres de la Chambre des Représentants – auxquels s’ajoutent les trois élus du District de Columbia / Washington – et un tiers des cent sénateurs.
Ce faisant, ils auront constitué les 538 membres du Collège électoral (Sénat et Chambre) qui éliront ensuite le Président des Etats-Unis. La comptabilisation et la possible contestation des votes dans chaque Etat puis au niveau national devront être achevées, au plus tard, le 15 décembre. Le 17 décembre, les 538 grands électeurs éliront à la majorité simple le Président des Etats-Unis. Le nouveau Congrès entrera en fonction le 3 janvier 2025 et, le 20 janvier, le Président commencera son mandat en prêtant serment sur la Bible devant le Capitole.
Cette procédure complexe, héritée de l’Histoire, peut aboutir à l’élection d’un Président n’ayant pas obtenu la majorité des votes au niveau national (c’est ainsi qu’en 2000 – Gore / Bush – et en 2016 – Hillary Clinton / Trump, le candidat démocrate a obtenu des millions de voix de plus que le candidat républicain au niveau national mais n’a pas obtenu la majorité du collège électoral). Cette procédure explique aussi pourquoi toute la campagne électorale se concentre sur les quelques États incertains (les « Swing States ») qui permettront à l’un des deux candidats d’obtenir le soutien de la majorité du Collège électoral. Cette année, sept Etats feront la majorité : Arizona, Géorgie, Michigan, Nevada, Caroline du Nord, Pennsylvanie et Wisconsin. Dernière particularité à signaler : les règles du vote sont établies au niveau des Etats et varient donc d’un État à l’autre.
Rappelons-nous enfin qu’en 2020, le Président Trump exerça des pressions directes sur les responsables de la comptabilisation des votes dans plusieurs Etats (la Géorgie notamment où une procédure judiciaire est en cours à ce sujet) pour obtenir un changement du résultat. N’ayant pas réussi, il s’efforça de convaincre le Congrès et son vice-président Mike Pence, de rejeter le résultat, encourageant une foule violente à envahir le Capitole. Il refuse aujourd’hui encore de reconnaître sa défaite en 2020.
Que va-t-il se passer cette année ? Les derniers sondages sont légèrement favorables à Kamala Harris qui a réussi à mobiliser le Parti démocrate. Si Trump devait néanmoins gagner le 5 novembre, nous savons à quoi nous en tenir en Europe, qu’il s’agisse de l’avenir de l’Ukraine ou de l’imposition de droits de douane sur nos exportations vers les Etats-Unis.
Si Trump devait perdre le 5 novembre, surtout s’il perdait de peu, nul doute qu’il ferait tout pour contester le résultat avec le soutien d’une partie non-négligeable du Parti républicain qu’il contrôle totalement, notamment dans l’Arizona, le Michigan, en Géorgie et dans d’autres Etats bascules.
La Cour suprême pourrait être amenée à se prononcer, comme ce fut le cas en 2000 lorsqu’elle décida que George W. Bush l’avait emporté sur Al Gore de quelques milliers de voix en Floride. Aujourd’hui, sur les neuf membres de la Cour, six sont des Républicains, dont trois ont été nommés par Trump.
Enfin, à cette incertitude majeure sur le résultat du scrutin présidentiel s’ajoute celle concernant les faibles majorités probables au Sénat – plutôt en faveur des Républicains – et à la Chambre des Représentants – plutôt en faveur des Démocrates.
En conclusion, même si le pire n’est jamais sûr, surtout aux Etats-Unis, les élections du 5 novembre pourraient bien déboucher sur l’un des plus importants défis auxquels la démocratie américaine pourrait être confrontée depuis la Guerre civile. L’Europe doit se préparer à tous les scénarios possibles.